samedi 31 décembre 2011

31.12.11 Au bout du monde avec Nicolas

(article pour la partie francophone du journal spécialisé "La Forêt bernoise" de décembre 2011, écrit à Algeciras fin novembre)

5 juillet 2011, jour de mon 65ème anniversaire. Je quitte définitivement mon travail à midi, après un dernier apéro pris avec tous les collaborateurs de la Division 8 à Tavannes.

A quatre heures, je saisis mon sac à dos avec une charge minutieusement étudiée et testée depuis une année. Je ferme la porte de la maison à La Neuveville derrière moi, la dernière fois pour une demi-année.

Mais à six heures déjà, je m'arrête à Cerlier dans le Clubhouse de la Société nautique pour préparer ma fête. J'ai convié tous mes amis pour fêter mon anniversaire, le début de ma retraite et mon départ. Il y a des représentants de toutes les époques de ma vie.

Et à minuit pile je reprends mon sac, je dis au revoir aux convives et disparais à pied, équipé d'une torche qui me montre le chemin dans la nuit noire, direction le bout du monde.

Et j'avance, jour après jour, sur un trajet Bellegarde - Grenoble - Avignon - Marseille - Perpignan - Figueras - Barcelona - Tortosa - Teruel - Guadalajara - San Lorenzo del Escorial - Toledo - Alcaraz - Almeria - Granada - Ronda - Tarifa - Cadiz où je prends le ferry pour les Islas Canarias. Ensuite, d'île en île, j'atteindrai en janvier celle qui est le plus à l'ouest : El Hierro, avec le phare Orchilla : la Fin du Monde.

Pourquoi ? Pourquoi se lancer dans une telle entreprise, avec un certain risque, beaucoup d'imprévus et plein d'incommodités ? Et ceci au moment de prendre la retraite, le repos bien mérité ?

Eh bien, je n'ai pas de réponse toute faite. L'idée m'est venue, un jour, je ne sais pas très bien comment. Est-ce Hans avec sa course à pied à Paris, est-ce Henri avec sa traversée de la Suisse qui m'en ont donné l'idée ?

Toujours est-il qu'au début je n'osais pas en parler, surtout pas à mon épouse Doris. Mais en fait je n'y croyais pas vraiment moi-même. Les Canaries à pied ? 6 mois de marche ? Un peu fou, non?

Si au début je ne savais pas pourquoi, aujourd'hui les choses sont plus claires :

Après une vie bien réglée, où les décisions sont prises avant tout par les "autres" ou par la "société", j'avais enfin la possibilité de ne faire que d'après ma tête. Me fixer un but hors du commun et d'y aller seul, sans la responsabilité de quelqu'un d'autre que moi.

Et de laisser derrière moi tout ce qui m'entoure : le travail par la force des choses, ma ville, mon lac, mes airs, mes divertissements, mon petit confort, mes amis, ma famille, mon épouse (avec son consentement, tout de même!).

Et d'échanger tout ça contre une vie simple, non matérialiste, où les problèmes sont basiques : par où passer, se procurer à manger, où dormir ? Et marcher, marcher, marcher... ça vide la tête.

Et cette vie de nomade me convient parfaitement. Je vis au jour le jour, utilise les chemins presque introuvables des anciens (même des romains !) Je marche sur les trajets de la transhumance d'antan, j'arrive à Algeciras avec les cigognes de toute l'Europe (ce matin j'ai été réveillé dans ma tente par une centaine de ces oiseaux craquetant joyeusement dans un pré, ultime halte avant la traversée pour l'Afrique : c'est merveilleux !)

Après cette expérience unique, je peux affronter la prochaine partie de ma vie sans contrainte, libre pour quelque chose de nouveau, sans avoir peur du grand vide.

Pour ceux qui voudraient encore suivre mon périple (quoi qu'il touche à sa fin),  je tiens un blog, une carte et un album de photos à l'adresse Internet www.bessire.ch/nicolas/nicolas.html

Que le vaya bien y hasta pronto

Nicolas Bessire

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